Les femmes enseignantes
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Dans un dossier étalé sur trois numéros de l’US (3, 4 et 6 de la fin de l’année 1968) Françoise Regnaut analyse le situation des femmes enseignantes.
L’analyse marxiste prévalait dans le syndicat, notamment dans sa majorité U&A : ce fut manifeste dans le dossier sur les femmes enseignantes de la fin 1968 . L’étude très solidement documentée de Françoise Regnaut était une nouveauté, malgré l’article et la motion pionnière de 1967 :
« Ce dossier, écrivait-elle, ne se propose pas de présenter l’enseignante comme une créature à part. Ce qui ne signifie pas pour autant que sa situation apparaîtra en tout point semblable à celle de son collègue masculin ». Les femmes-enseignantes étaient considérées avant tout comme des travailleuses intellectuelles, plus victimes du rapport de classes s’insinuant jusque dans la Fonction publique que du rapport des sexes .
Différence notable par rapport aux « féminismes de la différence » qui se développaient alors en Occident dans la foulée de 68 (ex. d Hélène Cixous, Luce Iragaray ou les collectifs italiens) et qui se concentraient sur la spécificité des femmes et faisaient de la distinction d’avec les hommes une question centrale.
Ce débat avait évidemment pris sa place dans le champ politique ; on a distingué des positions féministes radicales, socialistes, libérales dans tout le monde occidental… A gauche, où le vocabulaire marxiste était dominant, on a vu des femmes dire qu’elles constituaient une « classe opprimée » (American Redstockings). D’autres se sont inspirées des luttes anti-coloniales et anti-racistes et soutinrent que les femmes formaient une caste à part dont la condition était héritée et immuable. D’autres insistèrent sur l’altérité du sexe et du genre…
Les positions du SNES se situaient à l’opposé de toutes ces approches et les combattaient même. Elles illustraient pourtant cette « continuelle tension entre le besoin de bâtir une identité féminine et celui de démolir la catégorie « femme » » , que nous évoquions plus haut.
F. Regnaut démontrait dans le dossier de 68 que contrairement à des « idées largement répandues », les femmes enseignantes n’étaient nullement des privilégiées, ne jouissaient pas des mêmes garanties, droits et possibilités que les hommes pour leur carrière, étaient handicapées par la difficulté à être à la fois au travail et mère de famille. Il fallait donc « tenir compte indissolublement des deux fonctions également sociales de la femme : le travail et la maternité », conférant « à la femme qui travaille des droits particuliers ». Suivait un rappel des revendications du SNES « inséparables de l’ensemble des questions sociales et familiales » et concernant « le plus souvent la totalité du personnel, hommes et femmes », avec trois revendications prioritaires particulières :
– l’allongement du congé de maternité à 16 semaines,
– la réversion de la retraite de la femme fonctionnaire, en cas de décès, sur son conjoint,
– la reconduction des mesures d’abaissement de l’âge de la retraite des femmes en raison du nombre de leurs enfants.
Revendications qui n’étaient d’ailleurs pas nouvelles…
Mais, il n’était jamais fait allusion à un droit qu’une partie du mouvement féministe revendiquait alors, celui des femmes à la maternité consentie et à la sexualité libérée, non plus qu’au vote récent le 19/12/67 de la loi Neuwirth .