Durant
cette quinzaine, le mouvement prit une ampleur exceptionnelle. Des
facultés et des établissements scolaires, la
grève se répandit dans tous les secteurs
d’activité. Après
le 13 mai, la demande de la décision de la grève
généralisée se manifestait de plus en
plus. Le dimanche 19 mai, le CN du SNES appela tous les personnels
à la cessation des cours en restant dans les
établissements ; le lundi 20, la CA de la FEN
lança le mot d’ordre à tous les
personnels de l’Education nationale de
« cesser totalement leur
travail » à compter du 22 mai. Des
comités de grève
s’instituèrent dans les établissements
souvent « occupés »
comme l’étaient les facultés et les
usines. La reconnaissance des CAL et surtout l’occupation
nocturne des lycées ne faisait pas
l’unanimité parmi les enseignants, y compris
grévistes. Des commissions
profs-élèves travaillaient néanmoins
à l’étude de réformes et de
propositions de modalités exceptionnelles pour le bac (voir
partie 4). Les S1 et AG intersyndicales s’appliquaient
à définir les revendications et leurs
priorités. Les fissures dans
le front étudiants-travailleurs ne tardèrent pas
à s’élargir, notamment entre la CGT et
l’UNEF. A Paris, le 24 mai, la CGT et l’UNEF et le
SNESUp manifestèrent séparément. Le S3
de Paris fut présent dans la manifestation
organisée par la CGT. Les centrales
syndicales obtinrent des négociations
générales Gouvernement-Patronat-Syndicats qui se
conclurent par un « projet de protocole
d’accord » de Grenelle le 27 mai au matin.
La FEN participa à ces négociations mais sa
délégation ne comportait aucun dirigeant du SNES.
A Billancourt, les ouvriers de Renault estimèrent les
résultats insuffisants. Le même
jour, l’UNEF et le SNESup organisèrent le meeting
de Charléty pour contourner la CGT et le PCF et
s’opposer à la logique
« négociation-trahison ».
Le 29 mai, la CGT organisa une puissante manifestation à
Paris, à laquelle participa le S3 de Paris. La veille,
François Mitterrand avait réclamé la
démission du Gouvernement et annoncé son
intention de se présenter à nouveau comme
candidat à la présidence de la
République. Le
débat de fond tournait autour de la nature du
mouvement : révolutionnaire ou
revendicatif ? et son issue politique : gouvernement
de transition ou populaire à participation communiste sur la
base d’un programme commun ? Le discours du 30 mai
du général de Gaulle retentit comme la
clôture d’une période
d’incertitude, en annonçant la dissolution de
l’Assemblée nationale. L’exposition
illustre la scansion de cette période
mouvementée, la mobilisation, les débats dans les
établissements, la détermination pour obtenir
satisfaction sur les revendications, le désir
d’unité, la démocratie interne
exceptionnelle. |