Le
mouvement
social n’éclata pas dans un ciel serein,
malgré
l’entrée dans la
« société
de consommation ». La croissance
s’était
ralentie depuis 1964. L’héritage
de l’Etat providence commençait à
être
sérieusement remis en cause, comme en
témoignaient les ordonnances sur la
Sécurité
sociale. Des luttes sociales
s’étaient développées. La CGT et la
CFDT avaient conclu un accord d’unité
d’action en octobre 1966. La FEN s’y
était ralliée puis avait refusé de
s’associer aux initiatives unitaires contre
les ordonnances à la fin de l’année
1967. Le
système politique de la république gaullienne
connaissait une
certaine usure. L’exigence de l’unité
à gauche sur la base d’un programme
commun PCF-FGDS était en débat et progressait. Le
système
éducatif – qu’on appelait encore
l’Ecole – était un lieu de
cristallisation des
problèmes qui affectaient une société
occidentale capitaliste à la recherche
d’un nouveau souffle de croissance et pour cela en
reconversion souvent
douloureuse. « L’explosion
scolaire » des effectifs
d’élèves dans le second
degré était le signe
d’une forte demande sociale de poursuite des
études et de besoins de
qualifications. Le Pouvoir de la Ve République avait
répondu par la réforme
Fouchet, organisant une véritable révolution des
structures de l’Education
nationale, reposant sur la sélection d’une
population scolaire et universitaire
en croissance rapide. Beaucoup de nouveaux établissements
avaient été
construits de façon très
accélérée ; beaucoup de
nouveaux enseignants
avaient été recrutés, dont les rangs
s’étaient rajeunis et
féminisés et parmi
lesquels le nombre des auxiliaires grandissait ; la
« rénovation
pédagogique » était en marche
à travers bien des tâtonnements et des
débats. En
même temps, une nouvelle « civilisations
des mœurs »
s’édifiait sur l’individualisme,
remettant en cause les principes de l’autorité
et les codes de comportement. Les lycéens
commençaient à s’organiser dans des
Comités d’action lycéens. C’est
dans ce contexte qu’il faut situer les interventions du
nouveau SNES (Syndicat national des enseignements de Second
degré) au cours de
l’année scolaire 1967-1968. La
nouvelle majorité Unité & Action avait
donné un nouveau
visage au syndicat et s’engageait dans un programme
d’actions, continu et
progressif, pour une réforme démocratique du
service public d’éducation,
s’appuyant sur la promotion des enseignements de second
degré et nécessitant la
revalorisation de la condition enseignante. L’unité
d’action prônée et mise en
œuvre concernait les parents,
les étudiants, les lycéens, et plus largement
tous les travailleurs et leurs
organisations représentatives. |